ISAAC

ISAAC Augustin Marie Stéphane

Du vélo couché à la pédale ISO, une autre vision du cyclisme…

Augustin Isaac
posséda « son » avion dès 1929, qu’il pilotait lui-même,
y compris pour aller traiter des affaires.

Photos aimablement transmises par Madame Ruby.

Le 30 novembre 1933 en France, ensuite au Canada et aux Etats-Unis, il déposa le brevet d’un nouveau procédé de tissage des toiles, bandages et tulles élastiques qui les rendait extensibles tant en largeur qu’en longueur. Ce textile révolutionnaire fit le nouveau succès de la maison Dognin en trouvant des applications dans le domaine médical, la  défense et dans la mode où il captiva Balenciaga, Balmain, Carven, Chanel, Dior, Givenchy, Lanvin, Nina Ricci, Patou et tant d’autres, jusqu’en 1974.

Une dizaine de brevets suivirent (applications et méthodes de fabrications) jusqu’en 1971, demandés conjointement par Augustin Isaac et la firme DOGNIN S.A.

Au début de la Seconde Guerre Mondiale Augustin Isaac commença à s’intéresser à la bicyclette…..

Le vélo horizontal

En 1913 des bicyclettes semi-horizontales avait été construites à Lyon (voir page « Quelques Curiosités »). Le 6 juin 1939, Victor SIRONVAL demanda un brevet, pour une machine semblable, qui lui fut accordé le 2 janvier 1941.

Au début des années 1930, les bicyclettes horizontales de Charles MOCHET (Puteaux) connurent un certain succès et à partir de 1936  RAVAT (Saint-Étienne) commercialisait un modèle plus compact (brevet Henri Martin).

Le 20 décembre 1941, Augustin ISAAC demanda un brevet pour une bicyclette horizontale carrossée.

En 1942 et 1943 deux additifs furent déposés avec des détails supplémentaires.

Augustin Isaac, le 11 février 1944, à Villeurbanne dans une allée de l’usine DOGNIN.

Son vélo horizontal est équipé de pédales « pendulaires ». Le frein avant, la sonnette et le dérailleur ne semblent pas avoir de cable de commande. Longtemps il l’utilisa quotidiennement pour se rendre à l’usine. Les passants le croyaient infirme pour ne pas pouvoir utiliser une bicyclette normale.

Dans les domaines dits « techniques », la bicyclette en est, les machines qui sont modifiées progressivement pour vérifier la justesse des idées sont appelées des « monstres ». Celui d’Augustin Isaac est, à ce titre, exemplaire.

La base était un RAVAT (ci-dessous), le support de phare R (à droite) en atteste. Sur la photo de 1944, il n’en reste plus que la douille de direction, la structure (de teinte claire avec filets décoratifs) qui porte la boîte de pédalier avec excentrique, le guide et le carter de chaîne, la roue avant, le dérailleur et les freins (même si celui d’arrière avait été changé de place) et peut-être le guidon avec le plongeur raccourci.

Tout le reste avait été modifié. Il semblerait que le but fut un abaissement de l’assise du cycliste, peut-être une augmentation de la rigidité et, à l’évidence, la diminution de la fatigue des bras par l’abaissement du guidon.

Ci-dessus et dessous la machine actuelle.

Ensuite il fut encore modifié jusqu’à la fin des années 70 (ou début 80) ce qu’indiquent le dérailleur et le frein avant. Dans cette ultime version, le guidon a éte changé, le pédalier reculé et le siège avancé (peut-être aussi un peu réhaussé). Les garde-boues, la sonnette, l’éclairage et les pédales pendulaires ont disparus. Véritablement le « monstre » évolutif d’un inventeur !

La pédale pendulaire

L’idée d’abaisser le plan de pédalage en dessous de l’axe de pivotement de la pédale est très ancienne. Si les motivations ne furent pas toujours les mêmes, des essais se suivirent, plus ou moins épisodiquement.

Il se pourrait que cela commença dès les débuts du vélocipède à pédales (si l’on en croit un document publié le 31 décembre 1896 dans un journal, incomplet, dont nous ne connaissons pas le titre) :  » Pierre Michaux, affligé d’une nombreuse famille, quatre garçons et une fille, ne roulait pas sur l’or, quand un beau soir, un chapelier de la rue de Verneuil, M. Brund (probablement Brunel) — c’était en 1861 — lui apporta à réparer son célérifère (sic), qu’il avait fait munir de manivelles auxquelles étaient adaptées un système d’étriers fort incommodes. Ne pourriez-vous pas, dit-il en substance, mettre après ces manivelles une tige coudée et y visser un système de bobines pour poser les pieds ? »  Signé Mme Vve Richard LESCLIDE.

Par ailleurs dans le deuxième semestre de 1898 on pouvait lire ceci :

Ces pédales RAMSEY « swinging » avaient été commercialisées
dans le catalogue  de Rice Lewis & Son Ltd à Toronto, de février 1900, ainsi qu’aux USA.

Il y avait même deux modèles différents.

Augustin Isaac s’intéressa à cette partie de la bicyclette.
Il déposa un brevet le 11 février 1944, avec Mme Gauthier, sa belle-mère.

A partir du 21 octobre 1944, Augustin Isaac consigna dans un cahier tout ce qui concernait son travail , le brevet et ses contacts en vue de la fabrication de ses pédales dénommées en couverture :

Les pédales ISO Première génération commercialisée :

À droite, dans Le Cycle n°14, du 30 avril 1947, on trouve, dans un article qui traite de la pédale et du pédalage, signé par Étienne BERNADET, un passage qui ne cite pas de nom, mais semble bien concerner la pédale ISO.

 

Ci-dessous, un an et demi plus tard,  dans le n°14 de la même revue, daté du 22 octobre 1948, paraît une publicité de la société dont
Monsieur BERNADET est un des associés, qui propose des vélos de marque ELVISO :

ELVISO  à pédales suspendues …. Monsieur Étienne BERNADET est aussi l’auteur du premier article que nous connaissons, qui concerne les pédales ISO, publié dans « Le Cycle du 18 décembre 1948″

article pédlae ISO, comment lutter contre le point mort

Le Cycle du 8 janvier 1949 :

Comme on peut le voir
ci-dessus à gauche, ces pédales comportaient des axes de même
type que les pédales classiques.

Après la publication de ces documents,
M. Isaac demanda, en son seul nom,
trois brevets pour ces pédales en Alpax,
en Angleterre le 30 mars 1949 (valable aussi pour la France),
en Suisse le 1er avril 1949 et en Allemagne le 29 septembre 1950.

Ci-dessous trois machines construites pour Augustin Isaac
et pour Mathilde son épouse née Gauthier, avec les boîtes de pédalier réhausées, en conservant, par ailleurs, la géométrie « normale »:

Ce cadre homme,
assemblé avec des raccords,
est fabriqué par TERROT.

En dessous ,
la bicyclette PITHIOUD
de madame Isaac
est soudo-brasée
sans raccord.

… ainsi que le tandem FERDINAND
(voir page éponyme).

Science et Vie, juin 1949 :

Le Cycle, septembre 1949 :

Les pédales ISO nécessitaient de remonter l’axe du pédalier au même niveau que celui des roues de 650.  Augustin Isaac ne se contenta pas de cette modification et repensa toute la géométrie de la bicyclette afin d’abaisser le centre de gravité et d’en améliorer le confort.

Les vélos suivants sont construits selon la géométrie brevetée.

Randonneuse C.I.M. (voir page C.I.M.)
avec son panneau d’origine pour les expositions.

Pour cette machine d’essais et d’exposition, les trois axes (pédalier et roues) sont encore alignés. Afin de conserver au cycliste une position « sportive », une potence très longue (pour l’époque) fut adoptée.

 

Musée Henri MALARTRE – Ville de LYON
à Rochetaillée sur Saône
(reproduction interdite).

Une bicyclette à pédales « suspendues » ISO figure aux catalogues TERROT pour 1949 et 1950. Ce n’est plus le cas en 1951.

Ci-contre, l’image finale d’un très court film publicitaire de TERROT, probablement destiné aux entractes dans les salles de cinéma.

Augustin Isaac avait créé une société pour commercialiser les pédales ISO.

vélo CHARREL rouge de profil équipé de pédales ISO pendulaires
Facture Paul CHARREL datée de 1969 pour monsieur ISAAC

Pour une fille, Claude, cette CHARREL de 1969 dispose des premières pédales.
Plus tard Claude utilisa la bicyclette à cadre homme ci-dessous, dont elle trouvait cependant que les pédales accrochaient plus le sol. Effectivement sur la bicyclette rouge, l’axe de pédalier est un peu plus haut qu’une ligne passant par les axes des roues, alors que pour la blanche, l’axe de pédalier est un peu en dessous. Il semblerait également que les manivelles soient plus longues.

Si l’objectif n’était peut-être pas exactement le même que dans
la recherche de la fin du XIXème siècle, l’effet est identique
pour le positionnement de la pédale à l’arrêt, ainsi probablement
que pour le mouvement de pédalage.

C.L.C. est l’abréviation de Comptoir Lyon Cycle.
C’était un grossiste qui vendait séparément tous les composants nécessaires à la construction de bicyclettes, mais aussi des machines complètes, assemblées dans ses ateliers.

Deuxième génération commercialisée de la pédale ISO

Le Cycle, 14 octobre 1950

Avec décor rouge,
le modèle « cyclos »,
allégé (paroi verticale et axe plus minces).

Avec décor noir
le modèle »standard ».

Le modèle « large ».

L’axe classique était remplacé par un axe-cône réduit pour faciliter l’engagement du pied sur la plateforme.

Troisième génération commercialisée.

Il semble que le dessin original avait été fait pour les cycles RHONSON.

L’obligation de faire fabriquer un cadre spécial, donc plus cher, réduisait les possibilités de vente aussi un boîtier adaptable à toutes les bicyclettes fut proposé.

Le Cycle du 7 août 1954 ci-contre

Prospectus non daté qui exploitait 3 victoires
dans LYON-CHAMONIX et retour :

Nous n’avons pas de trace d’un monsieur MARTIN victorieux d’un Lyon-Chamonix-Lyon et il est certain qu’un fut gagné par Marcel MICHEL avec une bicyclette Ch. Sablière à pédales ISO. Y aurait-il une erreur dans le document ci-dessus ?

Nous ne connaissons pas de brevet pour l’adaptateur réhausseur de boîte de pédalier, et n’avons jamais vu de machine à cadre normal ainsi équipée.

La troisième génération existait aussi dans les trois tailles.

Ci-dessous, pour un gendre d’Augustin Isaac, avec les pédales de la troisième génération et l’axe du pédalier un peu plus relevé que sur les précédentes, cette machine sans marque apparente est celle qui a été la plus modernisée, preuve qu’elle roulait encore il y a peu :

Si des cyclotouristes s’accommodèrent bien de ces pédales,
il n’en fut pas de même pour les coureurs professionnels, dont certains des meilleurs français, auxquels on demanda de les essayer. Tous dirent qu’elles permettaient de mieux enrouler du braquet à une cadence de pédalage régulière, mais ne favorisaient pas les changements de rythme et étaient inutilisables en « danseuse ». Modestement, nous pouvons confirmer ce point-là. Il faut aussi remarquer que les deux premiers modèles, sauf modifications personnelles, ne permettaient pas le montage des cale-pieds indispensables en course.

En 1991,  la Rhodésienne du Sud, Paula Newby-Frazer fut Championne du Monde d’Ironwomen en utilisant un vélo à la géométrie très particulière, dont les manivelles articulées (avec des pédales automatiques) reprenaient le principe des pédales ISO.

En triathlon, la progression cycliste est la plus régulière possible, il n’y a pas d’accélération brutale. Par ailleurs les femmes, musculairement moins puissantes, utilisent moins, voire pas pour certaines, la position « danseuse » en côte. Le choix de cette très grande championne n’est pas contradictoire avec l’opinion des « anciens ».